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Conte de FIV

FIV : «La France pourrait mieux faire»

Par Stéphany Gardier- le 11/04/2013
Au lendemain de la mort du pionnier de la fécondation in vitro Robert Edwards, le Pr Samir Hamamah, chef du département de biologie de la reproduction du CHU de Montpellier, revient sur les avancées et les défis de cette technique d'aide à la procréation, qui fête ses 35 ans.

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LE FIGARO - Depuis la naissance du premier «bébé éprouvette» en 1978, 5 millions de bébés sont nés dans le monde grâce à la fécondation in vitro (FIV). Cette technique a-t-elle beaucoup évolué?

Samir HAMAMAH - La FIV consiste à mettre en contact in vitro, «dans une éprouvette», un ovule et un spermatozoïde, ces gamètes provenant du couple ou d'un don. Puis l'embryon est implanté dans l'utérus de la femme. Sur le principe, rien n'a changé depuis la naissance de Louise Brown, le premier bébé

-éprouvette, mais d'autres méthodes complémentaires ont été développées. De nombreuses recherches ont été menées pour permettre d'augmenter le taux de réussite des FIV, qui reste malheureusement bas. En 35 ans, le nombre de tentatives de FIV a été multiplié par 6 ou 7, alors que le taux de réussite plafonne. En France, ce taux tourne autour de 24%, selon l'Agence de biomédecine. Mais il est très variable selon les centres, et il faut reconnaître que la France n'est pas le pays le plus performant.

 

 

Sur quels paramètres peut-on intervenir pour augmenter le taux de réussite des

FIV?

Il y a deux paramètres majeurs: le choix de l'embryon et le moment pour l'implanter. En France, nous utilisons des caractéristiques morphologiques pour déterminer quel est le meilleur embryon. Or la forme d'un embryon est très variable au cours du temps, c'est donc une technique très subjective. Dans les pays anglo-saxons où une analyse des chromosomes est réalisée pour choisir les embryons, le taux de réussite est meilleur. Mais pour l'instant en France, ce type de pratique reste interdite, voire taboue, le spectre de l'eugénisme planant très fortement. Il faut cependant faire la différence entre écarter des embryons qui présentent des anomalies chromosomiques et ont donc moins de chances de s'implanter, et sélectionner un embryon sur ses caractéristiques génétiques. Il e

xiste par ailleurs des techniques comme celle que nous avons développée, qui permettent de repérer les embryons qui ont le plus de chance de s'implanter, en étudiant certaines molécules produites par les cellules qui entourent l'ovule. Ces approches moléculaires sont beaucoup plus fiables que le choix sur critères morphologiques.

Quant au moment le plus favorable pour implanter l'embryon, nous avons constaté que certains traitements hormonaux utilisés pour stimuler la production d'ovules peuvent affecter le tissu qui tapisse l'utérus, l'endomètre, et réduire les chances d'implantation de l'embryon. Dans notre service, nous essayons donc de favoriser l'implantation différée. Après la fécondation, les embryons sont conservés par vitrification et implantés quelques semaines plus tard, alors que la femme n'est plus sous traitement.

 

Les grossesses multiples sont-elles toujours aussi fréquentes et est-il envisageable d'en réduire le nombre?

Aujourd'hui, environ 20% des grossesses après FIV sont des grossesses gémellaires: c'est beaucoup. L'objectif d'ici à 10 ans serait d'atteindre 30% de réussite et aucune grossesse multiple. Je voudrais que les couples qui nous consultent quittent le plus tôt possible le circuit de l'assistance médicale à la procréation et avec un enfant dans les bras, mais un seul! Devenir parents de deux ou trois bébés n'est pas anodin pour le couple, même si le désir d'enfants est très fort. Le risque de complications au cours d'une grossesse multiple est également plus élevé. Il faut quand même souligner que le nombre d'embryons implantés simultanément a bien dim

in

ué depuis les premières FIV: il est aujourd'hui de 1,8 en moyenne. La

meilleure solution pour diminuer le taux de grossesses multiples reste l'implantation d'un seul embryon, or ce n'est le cas actuellement que dans 5% des FIV. Cela suppose notamment qu'on puisse être certain que l'embryon choisi ait le meilleur potentiel de se développer.

 

Trente-cinq ans après la découverte de Robert Edwards, quelles sont les pistes les plus prometteuses dans le domaine de la procréation médicalement assistée?

Le travail de Robert Edwards a été fondateur pour notre discipline. Depuis 1978, nous avons parcouru beaucoup de chemin, mais il nous reste encore beaucoup à faire. Robert Edwards m'a toujours dit: «Pour avoir la meilleure réussite possible, il faut mimer la conception naturelle.» Cela suppose que nous avancions dans la compréhension de l'embryon, or faire de la recherche sur ce sujet en France est un chemin de croix! Il faut réaliser qu'en France il n'y a pas plus de 10 projets menés actuellement. Nous espérons donc que l'interdiction qui bloque aujourd'hui la recherche sur les cellules embryonnaires soit levée rapidement. Ce serait un bon début pour espérer rattraper notre retard dans le domaine par rapport aux autre pays. Aujourd'hui, un couple sur six a recours à la médecine pour avoir un enfant, il faut que les problèmes d'infertilité soient reconnus comme problème de santé publique et que la recherche soit soutenue.

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